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Une trêve internationale pour la France de la guerre des mots

Dernière mise à jour : 6 juin 2020

Trêve internationale. Revoici le temps des étendards tricolores et des olas infatigables. Un stop dans le calendrier de la Ligue et dans l’excitation des fans clubistes. En dehors des rendez-vous internationaux et des terrains nous assistons à un drôle de manège. Le sujet est sérieux mais les discours sont invraisemblables. Il s’agit bien entendu de la cacophonie prétendant faire progresser le débat du racisme et des discriminations.



 

Un constat déroutant D’un côté des chants dits homophobes, puis leurs petites sœurs sarcastiques en forme de banderoles. De l’autre côté des Alpes les éternels cris de singes, visant cette fois l’attaquant belge Lukaku. Se greffe dans ce contexte le discours d’un Lilian Thuram qui entre lui-même dans une logique raciste, décrétant savoir comment pensent « les blancs »: "Les blancs pensent être supérieurs et ils croient l'être." La polémique prend forme et en guise de surenchère certains expliquent (comme Vikash Dhorasoo) que le racisme anti-blanc n’existe pas. Pierre Menès qui sur un plateau de télé fait état d’un constat personnel pour exprimer son ressenti de racisme anti-blanc est pris pour cible. On assiste donc à une hiérarchisation des offenses causées par la même idéologie selon la nature de la victime. Essayons de comprendre le mode d’emploi des philosophes du XXIe siècle. D’abord, il serait moins grave d’être raciste pour une raison d’orientation sexuelle que pour une raison de couleur de peau. Ensuite il faudrait dissocier la gravité d’un acte raciste envers un noir, un arabe, ou un blanc. Le dernier cas n’existe d’ailleurs pas, et si vous l’évoquez vous êtes insultant.

En somme, si un blanc est victime d’une agression raciste il devrait consulter pour ses hallucinations, voire sa mythomanie. Maladresses à deux vitesses ?

Sortons un peu du football, et rappelons-nous qu’il y a peu de temps l’opinion publique s’est offusquée des propos de Christine Angot, qui hiérarchisait maladroitement les souffrances des peuples opprimés. Comment valider aujourd’hui cette volonté de hiérarchisation des victimes du racisme ?

Vouloir régler le problème du racisme en accentuant les clivages est-il vraiment un bon calcul ? L’enjeu n’est-il pas plutôt de réaliser un rapprochement et de sensibiliser l’ensemble de la société au problème en adressant un seul et même message à chaque individu résident en France (pour commencer), sans autre distinction que son appartenance à notre société ?

Pointer le dysfonctionnement d’une société qui souffre du racisme en se cantonnant à son propre point de vue plutôt qu’à la globalité ne fera jamais rien avancer. Pour que la démarche reste crédible et efficace il faut déjà faire preuve d’une volonté d’unité.

Compte tenu des réactions déclenchées par les différents faits cités en début d’article, chacun aura pu constater que : -Stigmatiser une partie de la société pour en aider une autre ne fait que déplacer le problème idéologique. -Accuser les supporters d’être responsables du langage d’une société est vécu comme une hypocrisie. A problème épineux, décorticage méticuleux Quand une société a un problème il faut qu’elle le règle dans son ensemble, qu’elle ne se perde pas dans les détails, et qu’elle procède par étapes.

Pour le cas des ‘chants homophobes’, il est évident que le caractère homophobe existe dans le terme ‘enculé’ utilisé comme insulte. Il est aussi évident que cette insulte largement banalisée avec le temps a perdu de son sens et est employé dans la société au même titre que ‘salopard’ ou ‘enfoiré’. Enfin, il semble louable de vouloir supprimer un terme qui pourrait rester offensant pour les homosexuels. On pourrait penser qu’on en fait trop, que le terme ‘enculé’ n’est pas si nocif, et que le terme ‘pédé’ par contre lui est bien plus clairement chargé de haine homophobe. L’ennui reste une histoire de curseur. Comment justifier l’acceptabilité d’un terme et pas l’autre. On retomberait aussitôt dans la hiérarchisation bancale qui ne fait que maintenir par définition un déséquilibre dans le respect des personnes. Bien utiliser les armes

Il ne faut pas sous-estimer l’importance d’adapter la méthode d’intervention au problème. C’est là où la notion d’étapes est importante. On ne change pas un phénomène de société en s’attaquant à une minorité de personnes choisies arbitrairement (ici pour sa présence dans une tribune). La Ligue pour appliquer la nouvelle vision de la politique française a décidé de démarrer par la sanction, avant la communication. D’une part le supporter se sent stigmatisé (déjà par rapport aux interdictions de déplacements avant ça) puisqu’on en fait le principal responsable de l’insulte en le dissociant de la société. D’autre part on entre tout de suite dans un climat de conflit plutôt que d’organiser une communication poussée pour faire comprendre avec exactitude la nature du problème des mots à bannir.

De plus, une communication - et des actes - à l’échelle de la société seraient la bienvenue comme preuves que le gouvernement désir lutter contre l’homophobie en tant que telle et non uniquement contre le mode d’expression des supporters de football.

Et en même temps, quand on voit des débordements racistes comme les cris de singes envers Lukaku on souhaite voir une intervention de l’Etat pour sanctionner efficacement et fermement, notamment quand on entend les ultras de son propre club défendre ceux de Cagliari en expliquant que ces actes ne sont pas racistes et tout à fait normaux en Italie.

C’est pourquoi il est difficile de rester tolérant envers un des problèmes et pas l’autre lorsqu’on les met côte à côte. La subtilité pour l’heure reste qu’il faudra se donner du temps pour supprimer les chants homophobes et faire preuve de psychologie. L'avis Good Foot J’ose croire que le but final est bien d’assurer un respect de chacun dans les travées d’un stade en bannissant toute forme de racisme. S’il faut choisir entre la suppression d’une liberté d’utiliser une insulte, et la hiérarchisation grossière des formes de racisme, je pense que le bon sens nous indique la première option. Le climat des stades ne fera pas de magie pour celui de la société. Espérons que notre gouvernement trouve des vraies clés au nom de la liberté, de l’égalité et de la fraternité.

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